Le sténopé ou l’art de faire du beau avec du flou
Prenez une boîte à chaussures (vide !), faites un minuscule trou d’épingle au centre d’un des petits côtés de la boîte, découpez-le côté opposé et remplacez-le par un calque opaque : voilà, vous venez de créer un sténopé, c’est-à-dire une camera obscura (chambre noire) dotée d’un « objectif » extrêmement sommaire, sans lentilles, sans système de diaphragme, un petit trou, un simple petit trou.
Nous touchons ici aux balbutiements de la photographie, bien avant que les systèmes optiques ne soient composés de jeux de lentilles complexes assurant une netteté et une correction presque idéales des aberrations. Le sténopé permet bel et bien la construction d’une image, mais à cause des défauts que nous venons d’énoncer, cette image sera floue, les couleurs seront estompées et de manière générale, les contrastes seront affaiblis. De plus, un effet de vignetage peut se faire ressentir (les coins de l’image sont assombris).
Tout ceci pourrait faire fuir le photographe du XXIe siècle, tant nous sommes habitués à la course aux pixels et à une technologie toujours plus présente dans nos boîtiers. Aujourd’hui, nous vous proposons de tenter l’expérience. Et vous verrez que même un boîtier moderne doté d’un bouchon au centre duquel vous aurez fait un très (très très) petit trou fera de votre bête numérique un bon vieux sténopé des années 1850.
Quels sujets se prêtent bien à notre jeu ? Deux solutions s’offrent à vous. La première va dans le sens des défauts du sténopé : choisir des sujets presque monochromes, à très faible contraste, avec une lumière très uniforme ou presque absente. La deuxième est son contraire : choisir des sujets ultra-colorés, aux lignes très marquées, le tout baignant dans une lumière offrant de forts contrastes.
Un portrait, une architecture ou le milieu urbain (murs peints, affichage, façade de verre, etc.) seront des bonnes options pour faire vos premiers dans le… passé de la photographie. Amusez-vous bien !

Une série d’architecture traitée au sténopé. Une univers ultra coloré, des lignes très graphiques, des cadrages précis sont au service de cette technique d’un autre temps bien que ici réalisée avec un boitier numérique « bricolé » pour l’occasion.